Evolution de la restructuration des exploitations Des systèmes laitiers et allaitants interdépendants
La restructuration des exploitations laitières ou allaitantes françaises va-t-elle s’accélérer, ou au contraire se stabiliser dans les vingt ans à venir ? L’Institut de l’élevage a sorti sa calculette et ses modèles pour fournir des scénarii sur les tendances probables d’évolution de ces deux filières.
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Les questions sont nombreuses et restent à l’heure actuelle sans réponse précise tant les projections sont difficiles à faire compte tenu de la multiplicité des variables. Reste que l’Institut de l’élevage a voulu explorer ces pistes sur demande de l’interprofession laitière (Cniel) et de FranceAgriMer.
Scénario tendance à moyen et long terme
Les scientifiques ont tout d’abord construit un scénario tendanciel. Cette première étape a permis de « mettre en évidence les facteurs les plus structurants et de formaliser leurs effets, en identifiant notamment des règles de comportements démographiques », explique Christophe Perrot, de l'Institut de l’élevage.
Seconde étape de ce travail : proposer des scénarios alternatifs en se focalisant « sur les facteurs d’environnement les plus susceptibles d’évoluer et d’influencer certains comportements qui sont alors modifiés ».
Au final, les chercheurs ont ainsi privilégié deux horizons dans les simulations :
- un horizon de long terme (2035) : cette temporalité est nécessaire « pour analyser les phénomènes démographiques dont l’inertie est très importante », comme par exemple la carrière moyenne d’un chef d’exploitation laitière : elle est en effet de 23 ans s’il ne transmet pas l’exploitation contre 28 ans dans le cas contraire. « Ce n’est qu’en 2035 que la simulation s’équilibre à partir des hypothèses du modèle, après disparition quasi complète des éleveurs en place aujourd’hui qui restent dominants jusqu’en 2020-25 » ;
- Une projection à moyen terme (7 ans, 2007-2014) est utilisée pour intégrer de façon précise les effets des autres facteurs les plus explicatifs : âge du chef et existence d’un successeur connu, type d’organisation de la main-d’œuvre, système de production, taille des différents ateliers, régions.
À noter que les scénarios tendanciels sont entièrement calés sur les enquêtes sur la structure des exploitations agricoles du Ssp. « Ce dispositif permet de suivre les trajectoires d’un échantillon constant d’exploitations entre deux recensements agricoles exhaustifs », précise Christophe Perrot.
Une érosion lente pour les systèmes allaitants
L’analyse de ces projections, qui restent bien évidemment à confirmer dans les années à venir, montre que les tendances sont différentes selon que l’on soit dans la filière laitière ou la filière allaitante.
Ainsi, pour les exploitations allaitantes, le modèle de moyen terme met en avant l’importance des reconversions des systèmes laitiers vers des systèmes allaitant, « même dans le cas où le nombre d’exploitations laitières est préservé » souligne Christophe Perrot.
Les grandes tendances par zone de production Dans le bassin allaitant charolais-limousin (zone herbagère du Nord Massif Central hors montagne), la restructuration des exploitations allaitantes du noyau dur est plus classique, avec une décroissance régulière proche de -1,5 %/an depuis 1990 qui pourrait monter à -2,2 % sur 2007-2014. |
In fine, grâce à ces reconversions, le nombre d’exploitations allaitantes devrait se réduire à un rythme assez lent (-1,7 %/an entre 2007 et 2014 contre -0,8 %/an sur 2000-2007) « tout en passant pour la première fois sous la barre des 60.000 exploitations au-dessus de laquelle il évoluait depuis 1990 au plan national ».
Bien évidement, des hypothèses complémentaires restent à faire pour prévoir sur le long terme la dynamique des reconversions.
Si au contraire la conjoncture laitière se dégradait davantage, on peut s’attendre à un nombre de reconversion lait-viande encore plus important, ce qui pourrait conduire « à un nouveau maintien du nombre absolu d’exploitations qui dépasserait alors celui des exploitations laitières. Comme cette stabilité relative doit beaucoup aux reconversions lait-viande, il est évident que ce constat n’est pas valable pour toutes les zones de production ».
Restructuration et croissance externe
La question que se sont posée immédiatement après les scientifiques est celle de la productivité. « Cette accélération de la restructuration des exploitations allaitantes (de -0,8 à -1,7 %/an) est-elle de nature à relancer les gains de productivité du travail tombés au plus bas entre 2000 et 2007 ? » résume Christophe Perrot.
Selon les scientifiques pourtant, « l’intensification semble difficilement pouvoir procurer des marges de manœuvre supplémentaires » et ce, quel que soit le bassin de production.
« Par contre ce système de production pourrait continuer à gérer une part croissante du cheptel français aux dépends des autres systèmes sauf dans le bassin allaitant limousin-charolais où sa part est déjà à 93 % », releve le spécialiste de l’Institut de l’élevage avant de conclure : « restructuration plus croissance externe pourrait permettre de retrouver des gains de productivité du travail plus élevés qui semblent nécessaires à l’équilibre économique de nombreuses exploitations qui ont lourdement investi ces dernières années notamment pour améliorer les conditions de travail et les conditions d’élevage des animaux (bâtiments-équipements) ».
Pour aller plus loin Les résultats en détail dans le secteur laitier lire ici |
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